Qu’elle soit considérée comme un objet ou comme une matière, la corde offre une grande richesse de symboliques et d’usages à travers l’histoire et les civilisations qui ne cessent de fasciner Laurent Nicolas. Élément crucial aux origines de la géométrie, elle sert à l’organisation sociétale des Incas sous la forme de quipus. Au Japon, la corde peut signifier le caractère sacré d’un lieu – shimenawa – ou servir à un art martial consistant à ligoter un individu – hojojutsu –, dont le shibari est le pendant érotique. De nos jours, de nombreux corps de métiers continuent d’utiliser la corde pour sa grande résistance.
Dans son atelier, conscient de ces usages et du fort potentiel symbolique de l’objet en soi, Laurent Nicolas s’est emparé de cordes pour enserrer, ficeler, nouer des pièces de terre crue. Cette pratique raconte un état intermédiaire entre l’avant et l’après cuisson. La corde s’impose lorsque la terre est crue, elle la façonne et la transforme. Après cuisson, la terre figée s’impose à son tour obligeant la corde à s’adapter pour retrouver sa place. L’acte de nouer, à la fois liaison et maintien, se rapproche du rituel. Les nœuds s’apparentent à des synapses qui échangeraient des informations vitales, ouvrant tout un champ d’interprétations sur la création de réseaux et de connexions.
Plusieurs pièces s’enrichissent d’éléments extérieurs, véritables « supports-greffons » qui complètent la sculpture et la soutiennent littéralement : les matériaux et techniques choisis pour ces socles pensés sur mesure dialoguent avec l’œuvre encordée, dans l’opposition comme dans le rapprochement. Contextualiser une pièce revient à l’enrichir d’un débat supplémentaire : c’est le début d’une conversation.